A défaut de celle de l’artiste, peut-on faire la biographie d’une oeuvre anonyme ? De savoir qu’un réfugié politique d’Amérique centrale a revendu cette sculpture à un brocanteur qui l’a gardait dans la cave de son chalet en plein bois ne nous apporte rien de plus à ce que les deux visages, ceux du soldat qui s’apprête à tuer et celui de son prisonnier enchainé sur lequel il pointe son arme, ont chacun une expression d’égarement et de détresse. Ils sont tous les deux pris dans quelque chose qui les dépasse et dont ils sont les victimes. Ce lien est renforcé par le fait qu’ils sont sculptés dans un seul tronc d’arbre, exploit technique qui a peut-être été voulu pour ça. Que l’oeuvre ait été réalisé presque grandeur nature nous rapproche du tragique de la scène.