J’ignore ce que Guy Bailey faisait aux Beaux-Arts de Montréal au début des années 70, mais quand il en sort, il joue à l’autodidacte par excellence en devenant un peintre naïf. Il peint des villages, parfois vus de haut et qui semblent trop petits pour contenir une foule. Il semble qu’après avoir obtenu une notoriété dans ce domaine, il se soit absenté pour réapparaître avec une toute autre peinture. On pourrait dire que le naïf a tombé le masque, laissant surgir le primitif. S’inspirant au passage de l’art africain, c’est comme objet de sa peinture que Guy Bailey fait apparaître le masque. Le plâtre qu’il rajoute par dessus ses couleurs fait même du tableau tout entier un rappel du masque peint à même la peau du visage lors de cérémonies. La foule s’est muée en enchevêtrement de l’humain et de l’animal, comme dans le grand tableau « Mélanges » visible au M.A.S.C.
Plus que d’autres, ce tableau nous invite à rester longtemps devant lui pour que se révèle toute sa complexité, avec des scènes qui laissent le regard libre de son interprétation, même si le peintre y joue aussi avec l’histoire de la peinture, comme le montre une Piéta inattendue en bas à droite.
Patrick Cady